Il était une fois un prince aux couleurs de miel et de vanille. Il était si beau que de nombreuses filles en perdaient le goût de vivre. Elles allaient de bal en bal et si d’aventure, ce beau prince ne les regardait pas, elles ne ressentaient plus le besoin de s’alimenter. Se regardant avec tristesse dans le miroir du lac, elles se demandaient si la vie valait la peine d’être vécue.
La folie gagnait tous les villages et les familles maudissaient la beauté hors norme de ce prince. Certains songeaient déjà à lui planter une dague dans le cœur pour en finir avec les sanglots de leur parenté. Une seule fille se moquait d’être ou non regardée par ce prince à la beauté pernicieuse. On lui confia une mission de première importance : aller le voir et connaître le sujet de ses méditations. Pourquoi dédaignait-il toutes ces jeunes filles aux boucles ornées de roses et si belles que plus d’un homme se serait cru le plus heureux de la terre en l’ayant à son bras ?
Mélissa accepta ces travaux d’approche car elle aimait l’imprévu. En s’approchant du prince, elle ressentit pourtant une étrange attirance qui ne lui était pas familière. Se retournant, le prince darda ses beaux yeux d’un noir profond dans la lumière dorée du regard de la jeune fille. Elle eut l’impression de recevoir un coup de poignard et elle tomba sur le sol comme une fleur coupée.
Les villageois partis à sa recherche la découvrirent allongée sur un tapis de myosotis et de pervenches. « Que s’est-il passé ? » dit-elle en s’éveillant, semant la consternation dans les rangs. Quant au prince, on ne le revit plus et il s’effaça peu à peu de la mémoire des jeunes filles qui se résignèrent à prendre un mari et à mettre au monde de beaux enfants.
Toutes ? Non, il en reste une, Mélissa qui en soignant ses abeilles, rêve qu’un jour, elle le reverra, ce prince aux couleurs de miel, de vanille et de ruisselets d’eaux profondes où chantent les sirènes !