Un roi était malade, tout le temps malade. Plusieurs médecins l'examirent et lui dirent: « rien ne pourra être utile si ce n'est le lait de lionne, si on t'en apportait et que tu en buvais, tu guérirais ».
Qui pourra me querier du lait de lionne ? Qui le pourra ? dit le roi. Celui qui m'en apportera,
je le nommerai vizir», Quelqu'un l'entendit et demanda :
Est-il vrai que vous me nommeriez vizir ?
- Oui ; si tu me quéris du lait de lionne, je te nommerai vizir.
Donne-moi vingt chèvres
Le roi les lui donna; il les prit et alla à l'antre des lions. Il regarda,
découvrit des lionceaux et sut qu'une lionne doit y allaiter. II présenta deux
chèvres, la lionne vint les dévorer.
Le lendemain, il en mit deux qu'elle dévora. Le troisième jour, il ne mit rien; la lionne vint chercher, il se montra
furtivement, lui jeta deux chèvres et prit la fuite. Il ne lui mettait plus rien à
présent. Le lendemain, au cinquième jour, elle vint; il se montra un peu plus
et lui jeta deux chèvres.
Le sixième jour, il ne voulut rien lui donner et resta
debout. Elle vint, le regarda comme pour lui dire : « donne-moi les chèvres »,
Il lui amena les deux chèvres; il était de la famille à présent.
Le huitième jour, il jouait avec les lionceaux quand elle arriva. Elle le regarda, il partit
lui chercher deux chèvres qu'elle dévora. Ensuite elle s'étendit par terre, les
lionceaux vinrent téter ; quant à lui, il apporta un récipient, attrapa une des
mamelles, se mit à la traire comme les autres petits puis s'en alla
Sur le chemin du retour, tout content, il s'endormit.
Ses organes se disputèrent. Les mains dirent: « sans nous qui avons trait, point de bonheur »,
Les yeux dirent: « sans nous qui avons vu... ». Les jambes dirent : « sans
nous qui sommes venus ici... ». Chacun des organes du corps prétendit que
le mérite lui revenait. Alors la langue dit: « et moi ?.».
Quoi, toi ? lui répondit-on. Tu es emprisonnée par deux portes: des lèvres
et des dents et tu te fourres parmi nous!
Voilà qu'à présent, je vais vous envoyer à la tombe, vous verrez.
L'homme se présenta devant le roi.
- Quel est ce lait ?
-C'est du lait de chienne.
Du lait de chienne ! Jetez-le en prison ! Exécutez-le, celui-là ; il se moque
de moi !
On le jeta en prison, il s'y endormit. Ses organes se retrouvèrent
- Alors? leur dit la langue.
- Tu es tout, lui répondit-on.
- Voilà que vous êtes au bord de la tombe: Avouez-vous votre défaite ?
Nous avouons.
Maintenant que vous capitulez; c'est moi qui vous délivrerai.
Le lendemain matin, I'homme appela le gtolier : « par Dieu, dis au roi
que cet homme veut te voir ». Le roi le fit venir.
Pourquoi m'as-tu emprisonné?
Tu te moques de moi ! Tu m'apportes du lait de chienne !
- Non, non ! C'est du lait de lionne ; mais nous, nous l'appelons chienne,
parce que nous la méprisons. Il se peut que la chienne soit plus futée qu'elle.
du moment que je t'ai apporté de son lait.
Est-ce vrai ?
Vérifie.
On vérifia et on trouva que c'était bien du lait de lionne. Le roi le nomma (alors) vizir
La langue leur dit: « avez-vous vu à présent? C'est la langue qui éleve et
qui abaisse (son homme) »